Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/56

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— Mais, dame ! le premier venu.

— Elle ne parle que le romaïque.

— Alors c’est autre chose.

— Mais la verrons-nous, au moins ? demanda Beauchamp, ou, ayant déjà un muet, avez-vous aussi des eunuques ?

— Ma foi non, dit Monte-Cristo, je ne pousse pas l’orientalisme jusque-là : tout ce qui m’entoure est libre de me quitter, et en me quittant n’aura plus besoin de moi ni de personne ; voilà peut-être pourquoi on ne me quitte pas.

Depuis longtemps on était passé au dessert et aux cigares.

— Mon cher, dit Debray en se levant, il est deux heures et demie, votre convive est charmant, mais il n’y a si bonne compagnie qu’on ne quitte, et quelquefois même pour la mauvaise ; il faut que je retourne à mon ministère. Je parlerai du comte au ministre, et il faudra bien que nous sachions qui il est.

— Prenez garde, dit Morcerf, les plus malins y ont renoncé.

— Bah ! nous avons trois millions pour notre police : il est vrai qu’ils sont presque toujours dépensés à l’avance ; mais n’importe ; il restera toujours bien une cinquantaine de mille francs à mettre à cela.

— Et quand vous saurez qui il est, vous me le direz ?

— Je vous le promets. Au revoir, Albert ; messieurs, votre très humble.

Et, en sortant, Debray cria très haut dans l’antichambre :

— Faites avancer !

— Bon, dit Beauchamp à Albert, je n’irai pas à la Chambre, mais j’ai à offrir à mes lecteurs mieux qu’un discours de M. Danglars.