Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/297

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le café chez elle, et fais-lui comprendre que je demande la permission de lui présenter un de mes amis.

Ali s’inclina et sortit.

— Ainsi, c’est convenu, pas de questions directes, cher vicomte. Si vous désirez savoir quelque chose, demandez-le à moi, et je le demanderai à elle.

— C’est convenu.

Ali reparut pour la troisième fois et tint la portière soulevée, pour indiquer à son maître et à Albert qu’ils pouvaient passer.

— Entrons, dit Monte-Cristo.

Albert passa une main dans ses cheveux et frisa sa moustache, le comte reprit son chapeau, mit ses gants, et précéda Albert dans l’appartement que gardait, comme une sentinelle avancée, Ali, et que défendaient, comme un poste, les trois femmes de chambre françaises commandées par Myrtho.

Haydée attendait dans la première pièce, qui était le salon, avec de grands yeux dilatés par la surprise ; car c’était la première fois qu’un autre homme que Monte-Cristo pénétrait jusqu’à elle ; elle était assise sur un sofa, dans un angle, les jambes croisées sous elle, et s’était fait, pour ainsi dire, un nid, dans les étoffes de soie rayées et brodées, les plus riches de l’Orient. Près d’elle était l’instrument dont les sons l’avaient dénoncée ; elle était charmante ainsi.

En apercevant Monte-Cristo, elle se souleva avec ce double sourire de fille et d’amante qui n’appartenait qu’à elle ; Monte-Cristo alla à elle et lui tendit sa main, sur laquelle, comme d’habitude, elle appuya ses lèvres.

Albert était resté près de la porte, sous l’empire de cette beauté étrange qu’il voyait pour la première fois, et dont on ne pouvait se faire aucune idée en France.