Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/298

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— Qui m’amènes-tu ? demanda en romaïque la jeune fille à Monte-Cristo ; un frère, un ami, une simple connaissance, ou un ennemi ?

— Un ami, dit Monte-Cristo dans la même langue.

— Son nom ?

— Le comte Albert ; c’est le même que j’ai tiré des mains des bandits, à Rome.

— Dans quelle langue veux-tu que je lui parle ?

Monte-Cristo se retourna vers Albert :

— Savez-vous le grec moderne ? demanda-t-il au jeune homme.

— Hélas ! dit Albert, pas même le grec ancien, mon cher comte ; jamais Homère et Platon n’ont eu de plus pauvre, et j’oserai même dire de plus dédaigneux écolier.

— Alors, dit Haydée, prouvant par la demande qu’elle faisait elle-même qu’elle venait d’entendre la question de Monte-Cristo et la réponse d’Albert, je parlerai en français ou en italien, si toutefois mon seigneur veut que je parle.

Monte-Cristo réfléchit un instant :

— Tu parleras en italien, dit-il.

Puis se tournant vers Albert :

— C’est fâcheux que vous n’entendiez pas le grec moderne ou le grec ancien, qu’Haydée parle tous deux admirablement ; la pauvre enfant va être forcée de vous parler italien, ce qui vous donnera peut-être une fausse idée d’elle.

Il fit un signe à Haydée.

— Sois le bienvenu, ami, qui viens avec mon seigneur et maître, dit la jeune fille en excellent toscan avec ce doux accent romain qui fait la langue du Dante aussi sonore que la langue d’Homère ; Ali ! du café et des pipes !