Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/44

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— Vous trouvez cette maison jolie, n’est-ce pas ?

— Charmante.

— Eh bien ! mon mari n’a jamais voulu l’habiter.

— Oh ! reprit Monte-Cristo, en vérité, monsieur, c’est une prévention dont je ne me rends pas compte.

— Je n’aime pas Auteuil, Monsieur, répondit le procureur du roi, en faisant un effort sur lui-même.

— Mais je ne serai pas assez malheureux, je l’espère, dit avec inquiétude Monte-Cristo, pour que cette antipathie me prive du bonheur de vous recevoir ?

— Non, monsieur le comte… j’espère bien… croyez que je ferai tout ce que je pourrai, balbutia Villefort.

— Oh ! répondit Monte-Cristo, je n’admets pas d’excuse. Samedi, à six heures, je vous attends, et si vous ne veniez pas, je croirais, que sais-je, moi ? qu’il y a sur cette maison inhabitée depuis plus de vingt ans quelque lugubre tradition, quelque sanglante légende.

— J’irai, monsieur le comte, j’irai, dit vivement Villefort.

— Merci, dit Monte-Cristo. Maintenant il faut que vous me permettiez de prendre congé de vous.

— En effet, vous avez dit que vous étiez forcé de nous quitter, monsieur le comte, dit madame de Villefort, et vous alliez même, je crois, nous dire pourquoi faire, quand vous vous êtes interrompu pour passer à une autre idée.

— En vérité, madame, dit Monte-Cristo, je ne sais si j’oserai vous dire où je vais.

— Bah ! dites toujours.

— Je vais, en véritable badaud que je suis, visiter une chose qui m’a bien souvent fait rêver des heures entières.

— Laquelle ?

— Un télégraphe. Ma foi tant pis, voilà le mot lâché.

— Un télégraphe ! répéta madame de Villefort.