Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/58

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— Un jardin de deux arpents ?

— Et mille francs de rente.

— Mon Dieu ! mon Dieu !

— Mais prenez donc !

Et Monte-Cristo mit de force les dix mille francs dans la main de l’employé.

— Que dois-je faire ?

— Rien de bien difficile.

— Mais enfin ?

— Répéter les signes que voici.

Monte-Cristo tira de sa poche un papier sur lequel il y avait trois signes tout tracés, des numéros indiquant l’ordre dans lequel ils devaient être faits.

— Ce ne sera pas long, comme vous voyez.

— Oui, mais…

— C’est pour le coup que vous aurez des brugnons, et de reste.

Le coup porta ; rouge de fièvre et suant à grosses gouttes, le bonhomme exécuta les uns après les autres les trois signes donnés par le comte, malgré les effrayantes dislocations du correspondant de droite, qui, ne comprenant rien à ce changement, commençait à croire que l’homme aux brugnons était devenu fou.

Quant au correspondant de gauche, il répéta consciencieusement les mêmes signaux, qui furent recueillis définitivement au ministère de l’intérieur.

— Maintenant, vous voilà riche, dit Monte-Cristo.

— Oui, répondit l’employé, mais à quel prix !

— Écoutez, mon ami, dit Monte-Cristo, je ne veux pas que vous ayez des remords ; croyez-moi donc, car, je vous jure, vous n’avez fait de tort à personne, et vous avez servi les projets de Dieu.

L’employé regardait les billets de banque, les palpait,