Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Un enfant nouveau-né ? répéta Debray ; diable ! ceci devient sérieux, ce me semble.

— Eh bien ! dit Château-Renaud, je ne me trompais donc pas quand je prétendais tout à l’heure que les maisons avaient une âme et un visage comme les hommes, et qu’elles portaient sur leur physionomie un reflet de leurs entrailles. La maison était triste parce qu’elle avait des remords ; elle avait des remords parce qu’elle cachait un crime.

— Oh ! qui dit que c’est un crime ? reprit Villefort, tentant un dernier effort.

— Comment ! un enfant enterré vivant dans un jardin, ce n’est pas un crime ? s’écria Monte-Cristo. Comment appelez-vous donc cette action-là, monsieur le procureur du roi ?

— Mais qui dit qu’il a été enterré vivant ?

— Pourquoi l’enterrer là, s’il était mort ? Ce jardin n’a jamais été un cimetière.

— Que fait-on aux infanticides dans ce pays-ci ? demanda naïvement le major Cavalcanti.

— Oh ! mon Dieu ! on leur coupe tout bonnement le cou, répondit Danglars.

— Ah ! on leur coupe le cou, fit Cavalcanti.

— Je le crois… N’est-ce pas, monsieur de Villefort ? demanda Monte-Cristo.

— Oui, monsieur le comte, répondit celui-ci avec un accent qui n’avait plus rien d’humain.

Monte-Cristo vit que c’était tout ce que pouvaient supporter les deux personnes pour lesquelles il avait préparé cette scène ; et ne voulant pas la pousser trop loin :

— Mais le café, messieurs, dit-il, il me semble que nous l’oublions.