Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/90

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afin de voir si quelqu’un n’était point embusqué. Au bout de dix minutes, il fut convaincu que personne ne le guettait. Il courut aussitôt à la petite porte avec Ali, entra précipitamment, et, par l’escalier de service, dont il avait la clef, rentra dans sa chambre à coucher, sans ouvrir ou déranger un seul rideau, sans que le concierge lui-même pût se douter que la maison, qu’il croyait vide, avait retrouvé son principal habitant.

Arrivé dans la chambre à coucher, le comte fit signe à Ali de s’arrêter, puis il passa dans le cabinet, qu’il examina ; tout était dans l’état habituel : le précieux secrétaire à sa place, et la clef au secrétaire ; il le ferma à double tour, prit la clef, revint à la porte de la chambre à coucher, enleva la double gâche du verrou, et rentra.

Pendant ce temps, Ali apportait sur une table les armes que le comte lui avait demandées, c’est-à-dire une carabine courte et une paire de pistolets doubles, dont les canons superposés permettaient de viser aussi sûrement qu’avec des pistolets de tir. Armé ainsi, le comte tenait la vie de cinq hommes entre ses mains.

Il était neuf heures et demie à peu près ; le comte et Ali mangèrent à la hâte un morceau de pain et burent un verre de vin d’Espagne ; puis Monte-Cristo fit glisser un de ces panneaux mobiles qui lui permettaient de voir d’une pièce dans l’autre. Il avait à sa portée ses pistolets et sa carabine, et Ali, debout près de lui, tenait à la main une de ces petites haches arabes qui n’ont pas changé de forme depuis les croisades.

Par une des fenêtres de la chambre à coucher, parallèle à celle du cabinet, le comte pouvait voir dans la rue.

Deux heures se passèrent ainsi ; il faisait l’obscurité la plus profonde, et cependant Ali, grâce à sa nature sauvage, et cependant le comte, grâce sans doute à une