Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/226

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— Oh ! oui, s’écria-t-il, voilà la seule prière de mes derniers temps. Je ne demandais plus la liberté, je demandais la mémoire, je craignais de devenir fou et d’oublier ; mon Dieu ! vous m’avez conservé la mémoire, et je me suis souvenu. Merci, merci, mon Dieu !

En ce moment, la lumière de la torche miroita sur les murailles ; c’était le guide qui descendait.

Monte-Cristo alla au-devant de lui.

— Suivez-moi, dit-il ; et, sans avoir besoin de remonter vers le jour, il lui fit suivre un corridor souterrain qui le conduisit à une autre entrée.

Là encore Monte-Cristo fut assailli par un monde de pensées.

La première chose qui frappa ses yeux fut le méridien tracé sur la muraille, à l’aide duquel l’abbé Faria comptait les heures ; puis les restes du lit sur lequel le pauvre prisonnier était mort.

À cette vue, au lieu des angoisses que le comte avait éprouvées dans son cachot, un sentiment doux et tendre, un sentiment de reconnaissance gonfla son cœur, deux larmes roulèrent de ses yeux.

— C’est ici, dit le guide, qu’était l’abbé fou ; c’est par là que le jeune homme le venait trouver, et il montra à Monte-Cristo l’ouverture de la galerie qui, de ce côté, était restée béante. À la couleur de la pierre, continua-t-il, un savant a reconnu qu’il devait y avoir dix ans à peu près que les deux prisonniers communiquaient ensemble. Pauvres gens, ils ont dû bien s’ennuyer pendant ces dix ans.

Dantès prit quelques louis dans sa poche, et tendit la main vers cet homme qui, pour la seconde fois, le plaignait sans le connaître.

Le concierge les reçut, croyant recevoir quelques me-