Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/285

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— Je dis qu’un mot de toi, Haydée, m’a plus éclairé que vingt ans de ma lente sagesse ; je n’ai plus que toi au monde, Haydée ; par toi je me rattache à la vie, par toi je puis souffrir, par toi je puis être heureux.

— L’entends-tu, Valentine ? s’écria Haydée ; il dit que par moi il peut souffrir ! Par moi, qui donnerais ma vie pour lui !

Le comte se recueillit un instant.

— Ai-je entrevu la vérité ? dit-il, ô mon Dieu ! n’importe ! récompense ou châtiment, j’accepte cette destinée. Viens, Haydée, viens…

Et jetant son bras autour de la taille de la jeune fille, il serra la main de Valentine et disparut.

Une heure à peu près s’écoula, pendant laquelle haletante, sans voix, les yeux fixes, Valentine demeura près de Morrel. Enfin elle sentit son cœur battre, un souffle imperceptible ouvrit ses lèvres, et ce léger frissonnement qui annonce le retour de la vie courut par tout le corps du jeune homme.

Enfin ses yeux se rouvrirent, mais fixes et comme insensés d’abord ; puis la vue lui revint, précise, réelle ; avec la vue le sentiment, avec le sentiment la douleur.

— Oh ! s’écria-t-il avec l’accent du désespoir, je vis encore ! Le comte m’a trompé !

Et sa main s’étendit vers la table, et saisit un couteau.

— Ami, dit Valentine avec son adorable sourire, réveille-toi donc et regarde de mon côté.

Morrel poussa un grand cri, et délirant, plein de doute, ébloui comme par une vision céleste, il tomba sur ses deux genoux…

Le lendemain, aux premiers rayons du jour, Morrel et Valentine se promenaient au bras l’un de l’autre sur le rivage, Valentine racontant à Morrel comment Monte-