Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/77

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que vous accusez injustement, ne peuvent être comptés que pour une chose, c’est-à-dire pour avoir créé l’assassin de Valentine !

Villefort et d’Avrigny se regardèrent.

— Oui, oui, rappelez-vous, dit Morrel ; car ces paroles que vous croyiez livrées au silence et à la solitude, sont tombées dans mon oreille.

Certes, de ce soir-là, en voyant la coupable complaisance de M. de Villefort pour les siens, j’eusse dû tout découvrir à l’autorité ; je ne serais pas complice comme je le suis en ce moment de ta mort, Valentine ! ma Valentine bien aimée ! mais le complice deviendra le vengeur ; ce quatrième meurtre est flagrant et visible aux yeux de tous, et si ton père t’abandonne, Valentine, c’est moi, c’est moi, je te le jure, qui poursuivrai l’assassin.

Et cette fois, comme si la nature avait enfin pitié de cette vigoureuse organisation prête à se briser par sa propre force, les dernières paroles de Morrel s’éteignirent dans sa gorge ; sa poitrine éclata en sanglots, ses larmes, si longtemps rebelles, jaillirent de ses yeux, il s’affaissa sur lui-même, et retomba à genoux pleurant près du lit de Valentine.

Alors ce fut le tour de d’Avrigny.

— Et moi aussi, dit-il d’une voix forte, moi aussi je me joins à M. Morrel pour demander justice du crime ; car mon cœur se soulève à l’idée que ma lâche complaisance a encouragé l’assassin !

— Ô mon Dieu ! mon Dieu ! murmura Villefort anéanti.

Morrel releva la tête, et lisant dans les yeux du vieillard qui lançaient une flamme surnaturelle :

— Tenez, dit-il, tenez, M. Noirtier veut parler.

— Oui, fit Noirtier avec une expression d’autant plus