Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/105

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fait, comment les choses se sont passées. On a abusé de ta jeunesse et de ton peu d’habitude, je le vois bien, tron de l’air ! car de la bravoure, je vois aussi que tu en as à leur revendre. Dis-moi tout, l’homme, et je me charge de remettre les affaires dans le bon chemin.

La tâche que M. Coumbes imposait à Marius était fort embarrassante ; l’accueil que le maître du cabanon avait fait à ce que le jeune homme considérait comme un triomphe, les jurons dont, contre son habitude, il assaisonnait son discours, avaient jeté déjà quelque désordre dans ses pensées ; mais, lorsqu’il se vit mis en demeure ou de mentir ou d’avouer à son parrain la pacifique intervention de Mlle Madeleine, lorsqu’il redouta qu’en parlant d’elle on ne lût sur son visage ce qui se passait dans son âme, ce désordre devint une déroute ; toutes ses idées prirent la fuite, s’échappèrent avec une telle confusion, qu’il fut impossible à son cerveau d’en rattraper une seule à la course ; il hésitait il balbutiait, il tremblait, il faisait maints coq-à-l’âne qui achevèrent d’exaspérer M. Coumbes.

Celui-ci pressentit anguille sous roche, et mit dans son interrogatoire une énergie nouvelle ; il harcela son filleul de questions, il le pressa, il le poussa, suscita des contradictions, il le dérouta par des changements de front soudains ; il fit tant et si bien, que, pièce à pièce, lambeau par lambeau, il finit par ob-