Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/240

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loyale, trop généreuse pour t’être rendu coupable de ce lâche assassinat.

– Ma mère, répondit le jeune homme d’une voix calme, mais en baissant la tête, M. Coumbes avait raison tout à l’heure : chacun pour soi dans ce monde ; c’est pour cela que le sang doit retomber sur la tête de celui qui l’a versé.

– Que dis-tu là, mon Dieu ! s’écria Millette.

– Je dis que je viens prendre la place de M. Coumbes, faussement et injustement accusé ; je dis que je viens présenter mes mains aux liens qui entourent les siennes ; je dis enfin que, si quelqu’un doit répondre du meurtre qui a été commis, c’est moi, Marius Manas, et non pas M. Coumbes.

– Oh ! c’est impossible ! s’écria Millette ; à toi comme à lui tout à l’heure, je répondrai : Tu mens ! On peut tromper les hommes, on peut tromper les juges, mais on ne trompe ni Dieu ni sa mère. Est-ce que tu oserais me regarder en face, comme tu l’as fait tout à l’heure et comme tu le fais en ce moment si tes mains étaient teintes du sang de ton prochain ? Non, non, ce n’est pas le cœur loyal qui, ce matin, aussitôt qu’il a connu la déplorable position que j’avais acceptée pour lui, n’a pas hésité entre la misère et le reproche de sa conscience ; non, ce n’est pas cet homme-là qui frappe dans l’ombre avec l’arme d’un traître.