Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/27

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ruban de velours n’avait emprisonné une plus belle chevelure que ne l’était celle de Millette ; jamais fichu plissé n’avait dessiné un plus gentil corsage ; jamais robe n’avait été plus adroitement raccourcie pour laisser entrevoir une jambe fine, un petit pied cambré.

Millette pouvait passer, dans sa jeunesse, pour le type le plus complet de la beauté arlésienne, et, avec tant de raisons pour devenir une femme à la mode, Millette avait tenu toutes les promesses de son regard doux et honnête, et avait épousé vulgairement un homme de sa condition, un ouvrier maçon.

Il est triste que la Providence ne se charge pas de récompenser celles-là qui, comme Millette, vont droit au port, malgré les écueils, et donnent au monde l’exemple de la véritable vertu.

Mais le désintéressement de Millette lui porta malheur ; son union eut à peine quelques jours de printemps, et bientôt celui qu’elle considérait comme un papillon devint une chenille. Elle l’avait choisi pour mari, malgré sa pauvreté, parce qu’il lui semblait laborieux. Il lui prouva que la comédie du mariage se joue dans les galetas comme sous les lambris dorés ; il révéla ce qu’il était, c’est-à-dire querelleur, brutal, paresseux et débauché, et les beaux yeux de la pauvre Millette versèrent souvent des larmes abondantes.

Pierre Manas, c’était le nom du mari de Millette,