Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/294

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On commençait à distinguer les pitons de Marchia-Veyre. À mesure qu’ils approchaient, comme si Millette eût deviné qu’ils marchaient vers l’inconnu, elle sentait redoubler les battements de son cœur ; par moment, ces battements étaient si rapides et si violents, qu’il lui semblait que ce cœur allait déchirer son enveloppe. Jusque-là, Pierre Manas était demeuré silencieux ; en voyant le but vers lequel se concentraient ses pensées de rapine, il prit la loquacité railleuse qui lui était habituelle.

– Coquin de sort ! s’écria-t-il, tu ne peux pas dire, Millette, que tu n’as pas le meilleur mari de toute la Provence. Regarde, non seulement je te conduis à la campagne, mais encore je compromets mes affaires et je perds une heure de chemin pour te donner l’agrément d’une promenade en mer. Et maintenant, ajouta-t-il en débarquant, tu comprends bien qu’il faut que tant de galanterie soit récompensée.

– Pierre, dit Millette ; pourvu que la délivrance de notre pauvre enfant soit au bout de ce que tu me demanderas, je ferai tout ce qui te sera agréable.

– Eh bien, à la bonne heure, voilà qui est parlé.

Et Pierre Manas, prenant le bras de sa femme, s’achemina vers le cabanon, dont la masse noire se détachait dans l’obscurité par sa silhouette, plus sombre encore que la nuit.