Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/271

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Puis elle avait dit :

– Vous avez vu l’homme qui nous a attendues sur la route, Lisette ; j’ai rendez-vous avec lui ce soir, de neuf à dix heures, dans ma chambre. Vous irez l’attendre où vous savez et le conduirez vers moi… Je ne veux point, ajouta-t-elle tout bas, que l’on dise que je n’ai pas été fidèle à ma parole, même après ma mort.

Thibault n’avait rien à dire : ce qui avait été arrêté avait été tenu.

Seulement, la comtesse s’était chargée seule de sa vengeance.

C’est ce que l’on sut lorsque le valet de chambre, inquiet du sort de son maître, entrouvrit la porte de la chambre, entra sur la pointe du pied, et trouva le comte couché sur le dos, un poignard dans le cœur.

Alors, on était accouru pour annoncer la nouvelle à madame, et l’on avait trouvé madame morte de son côté.

Le bruit de la double mort s’était aussitôt répandu dans la maison, et tous les domestiques avaient fui en disant que l’ange exterminateur était entré dans le château. Seule, la chambrière était restée pour accomplir les dernières volontés de sa maîtresse.

Thibault n’avait plus rien à faire dans la maison. Il laissa la comtesse sur son lit, Lisette près d’elle, et descendit.

Comme l’avait dit la chambrière, il n’avait plus à craindre de rencontrer ni maîtres ni domestiques. Les domestiques s’étaient enfuis, les maîtres étaient morts.

Thibault reprit le chemin de la brèche. Le ciel était sombre, et, si l’on n’eût été au mois de janvier, on l’eût dit orageux.