Page:Dumas - Le Vicomte de Bragelonne, 1876.djvu/282

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pour vous, et, croyez-moi bien, jamais personne ne fera pleurer mon fils.


D’Artagnan venait de poser sa main sur l’épaule de de Wardes. — Page 279.

— Merci, Madame, merci ! dit le jeune homme attendri et suffoquant d’émotion ; je sens qu’il y avait place encore dans mon cœur pour un sentiment plus doux, plus noble que l’amour.

La reine mère le regarda et lui serra la main.

— Allez, dit-elle.

— Quand faut-il que je parte ? Ordonnez !

— Mettez le temps convenable, milord, reprit la reine ; vous partez, mais vous choisissez votre jour… Ainsi, au lieu de partir aujourd’hui, comme vous le désireriez sans doute ; demain, comme on s’y attendait, partez après-demain au soir ; seulement, annoncez dès aujourd’hui votre volonté.

— Ma volonté ? murmura le jeune homme.

— Oui, duc.

— Et… je ne reviendrai jamais en France ?

Anne d’Autriche réfléchit un moment, et s’absorba dans la douloureuse gravité de cette méditation.

— Il me sera doux, dit-elle, que vous reveniez le jour où j’irai dormir éternellement à Saint-Denis près du roi mon époux.

— Qui vous fit tant souffrir ! dit Buckingham.

— Qui était roi de France, répliqua la reine.

— Madame, vous êtes pleine de bonté, vous entrez dans la prospérité, vous nagez dans la joie ; de longues années vous sont promises.

— Eh bien, vous viendrez tard alors, dit la reine en essayant de sourire.