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LES FRÈRES CORSES

nuit ; c’est pour cela que vous m’avez trouvé si pâle ; la vue des morts pâlit les vivants.

Je le regardai avec un étonnement qui n’était point exempt de terreur.

— Vous avez vu votre père cette nuit, dites-vous ?

— Oui.

— Et il vous a parlé ?

— Il m’a annoncé ma mort.

— C’était quelque rêve terrible, dis-je.

— C’était une terrible réalité.

— Vous dormiez ?

— Je veillais… Ne croyez-vous donc pas qu’un père puisse visiter son fils ?

Je baissai la tête ; car, au fond du cœur, moi-même, je croyais à cette possibilité.

— Comment cela s’est-il passé ? demandai-je.

— Oh ! mon Dieu, de la façon le plus simple et la plus naturelle. Je lisais, en attendant mon père ; car je savais que, si je courais quelque danger mon père m’apparaîtrait, lorsque, à minuit, ma lampe a pâli d’elle-même, la porte s’est ouverte lentement, et mon père a paru.

— Mais comment ? demandai-je.

— Mais comme de son vivant : vêtu de l’habit qu’il portait habituellement ; seulement, il était très-pâle, et ses yeux étaient sans regard.

— Oh ! mon Dieu !…