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LES FRÈRES CORSES

— À propos, me dit-il, vous trouverez mon testament sur la table où j’écrivais lorsque vous êtes entré.

— C’est bien, répondis-je, soyez tranquille.

— Messieurs, quand vous voudrez, dit le vicomte de Châteaugrand.

— Me voici, répondit Louis. Adieu, cher ami ! merci de toute la peine que je vous ai donnée, sans compter, ajouta-t-il avec un sourire mélancolique, celle que je vous donnerai encore.

Je lui pris la main ; elle était froide, mais sans aucune agitation.

— Voyons, lui dis-je, oubliez l’apparition de cette nuit et visez de votre mieux.

— Vous rappelez-vous le Freyschutz ?

— Oui.

— Eh bien, vous le savez, chaque balle a sa destination… Adieu.

Il rencontra sur sa route le baron Giordano, qui tenait à la main le pistolet qui lui était destiné ; il le prit, l’arma, et, sans même y jeter les yeux, alla se placer à son poste indiqué par un mouchoir.

M. de Château-Renaud était déjà au sien.

Il y eut un instant de morne silence, pendant lequel les deux jeunes gens saluèrent leurs témoins, puis ceux de leurs adversaires, et enfin se saluèrent l’un l’autre.

M. de Château-Renaud paraissait parfaitement avoir l’habitude de ce genre d’affaires, et il était souriant