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OTHON L’ARCHER

Pierre l’Ermite lui-même ; il avait touché le saint tombeau de Notre-Seigneur, et avait été béni par le révérend père gardien du saint sépulcre. Pierre l’Ermite l’avait donné à Godefroy de Bouillon comme un talisman sacré auquel étaient attachées des propriétés miraculeuses, et Godefroy assura à la jeune fille que, si quelque danger la menaçait, elle n’avait qu’à prendre ce chapelet, dire avec lui sa prière d’un cœur religieux et fervent, et qu’alors il entendrait, quelque part qu’il fût, le son de la clochette qui y était attachée, fut-il séparé d’elle par des montagnes et par des mers. Béatrix reçut avec reconnaissance le précieux rosaire dont son père, son oncle et elle connaissaient seuls la vertu, et demanda au prince la permission de fonder une chapelle qui renfermerait dignement dans son écrin de marbre un aussi riche joyau. Je n’ai pas besoin de vous dire que cette demande lui fut accordée.

« Les croisés partirent. Une inscription que vous verrez à la porte du château, et que l’on dit gravée par la main de Godefroy lui-même, indique que ce fut le 3 septembre de l’année 1096. Ils traversèrent paisiblement et sans opposition l’Allemagne et la Hongrie, atteignirent les frontières de l’empire grec, et, après avoir séjourné quelque temps à Constantinople, entrèrent en Bithynie. Ils se rendaient à Nicée, et il n’y avait pas à se tromper de route, car la route leur était indiquée par les ossements de deux armées qui avaient précédé