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OTHON L’ARCHER

monta au visage ; et, sans rien répondre, le jeune archer s’inclina et sortit.

Ce n’était pas sans peine que le prince avait pris une pareille résolution, et il avait dû en appeler au sentiment de colère qu’avait éveillé en lui l’obstination du coupable pour le punir aussi sévèrement. Aussi, pensant que le jeune homme se repentirait, le prince alla à la fenêtre qui donnait sur la cour que devait traverser Othon pour se rendre au quartier des archers, et se cacha derrière un rideau afin de n’être point aperçu, certain qu’il était de le voir revenir sur ses pas. Mais Othon s’éloigna lentement et sans détourner la tête ; et le prince le suivait des yeux, perdant une espérance à chaque pas que faisait le jeune homme, lorsqu’il aperçut du côté opposé de la cour le comte Karl de Hombourg, qui venait de veiller lui-même à ce que le déjeuner de Hans lui fût servi à son heure accoutumée. Le vieux comte et le jeune archer marchaient donc au-devant l’un de l’autre, lorsqu’en levant les yeux l’un sur l’autre, ils s’arrêtèrent tous deux comme frappés de la foudre. Othon avait reconnu Karl ; Karl avait reconnu Othon.

Le premier mouvement du jeune homme fut de s’éloigner ; mais Hombourg lui jeta les bras autour du cou et le retint en l’appuyant contre son cœur avec toute la force de la vieille amitié qui, depuis trente ans, l’unissait à son père.

Le prince pensa que le bon chevalier devenait fou ;