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LES FRÈRES CORSES

Colona, qui, par malheur, avait son fusil tout chargé, lui a envoyé une balle à bout portant et l’a tué.

— Et combien d’existences ont payé cette rixe ?

— Il y a eu neuf personnes tuées.

— Et cela pour une misérable poule qui valait douze sous.

— Sans doute ; mais, je vous le disais tout à l’heure, ce n’est pas la cause, c’est le résultat qu’il faut voir.

— Et parce qu’il y a eu neuf personnes de tuées, il faut qu’il y en ait une dixième ?

— Mais vous voyez bien que non, reprit Lucien, puisque je me suis fait arbitre.

— Sans doute à la prière d’une des deux familles ?

— Oh ! mon Dieu, non : à celle de mon frère, à qui on a parlé chez le garde des sceaux. Je vous demande un peu de quoi diable ils se mêlent à Paris, de s’occuper de ce qui se passe dans un misérable village de la Corse. C’est le préfet qui nous aura joué ce tour, en écrivant à Paris que, si je voulais dire un mot, tout cela finirait comme un vaudeville, par un mariage et un couplet au public ; alors on se sera adressé à mon frère, qui a pris la balle au bond, et qui m’a écrit en disant qu’il avait donné sa parole pour moi. Que voulez-vous ! ajouta le jeune homme en relevant la tête, on ne pouvait pas dire là-bas qu’un de Franchi avait engagé la parole de son frère, et que son frère n’a pas fait honneur à l’engagement.