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Louchard disposait de cinq cents maquignons et marchands de chevaux, catholiques enragés.

Un potier d’étain qui s’appelait Pollard et un charcutier nommé Gilbert présentaient quinze cents bouchers et charcutiers de la ville et des faubourgs.

Maître Nicolas Poulain, l’ami de Chicot, offrait tout et tout le monde.

Quand le duc, bien claquemuré dans une chambre sûre eut entendu ces révélations et ces offres :

— J’admire la force de la Ligue, dit-il, mais le but qu’elle vient sans doute me proposer, je ne le vois pas.

Maître Lachapelle-Marteau s’apprêta aussitôt à faire un discours en trois points ; il était fort prolixe, la chose était connue. Mayenne frissonna.

— Faisons vite, dit-il.

Bussy-Leclerc coupa la parole à Marteau.

— Voici, dit-il. Nous avons soif d’un changement ; nous sommes les plus forts, et nous voulons en conséquence ce changement : c’est court, clair et précis.

— Mais, demanda Mayenne, comment opérerez-vous pour arriver à ce changement ?

— Il me semble, dit Bussy-Leclerc avec cette franchise de parole qui chez un homme de si basse condition que lui pouvait passer pour de l’audace, il me semble que l’idée de l’Union venant de nos chefs, c’était à nos chefs et non à nous d’indiquer le but.

— Messieurs, répliqua Mayenne, vous avez parfaitement raison : le but doit être indiqué par ceux qui ont l’honneur d’être vos chefs ; mais c’est ici le cas de vous répéter que le général doit être le juge du moment de livrer la bataille, et qu’il a beau voir ses troupes rangées, armées et animées, il ne donne le signal de la charge que lorsqu’il croit devoir le faire.

— Mais enfin, Monseigneur, reprit Crucé, la Ligue est pressée, nous avons déjà eu l’honneur de vous le dire.