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II

CHICOT LATINISTE.


Après le départ des jeunes gens, on se rappelle que Chicot avait marché d’un pas rapide.

Mais aussi, dès qu’ils eurent disparu dans le vallon que forme la côte du pont de Juvisy sur l’Orge, Chicot, qui semblait, comme Argus, avoir le privilège de voir par derrière, et qui ne voyait plus ni Ernauton, ni Sainte-Maline, Chicot s’arrêta au point culminant de la butte, interrogea l’horizon, les fossés, la plaine, les buissons, la rivière, tout enfin, jusqu’aux nuages pommelés qui glissaient obliquement derrière les grands ormes du chemin ; et sûr de n’avoir aperçu personne qui le gênât ou l’espionnât, il s’assit au revers d’un fossé, le dos appuyé contre un arbre et commença ce qu’il appelait son examen de conscience.

Il avait deux bourses d’argent, car il s’était aperçu que le sachet remis par Sainte-Maline, outre la lettre royale, contenait certains objets arrondis et roulants qui ressemblaient fort à de l’or ou à de l’argent monnayé.

Le sachet était une véritable bourse royale, chiffrée de deux H, un brodé dessus, l’autre brodé dessous.

— C’est joli, dit Chicot en considérant la bourse, c’est charmant de la part du roi ! Son nom, ses armes ! on n’est pas plus généreux et plus stupide ! Décidément, jamais je ne ferai rien de lui. Ma parole d’honneur ! continua Chicot, si une chose m’étonne, c’est que ce bon et excellent roi n’ait