Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 3.djvu/139

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— Ciel et terre !… la dame de Monsoreau !!!

— C’est un nom que tu ne répéteras plus !… s’écria Remy, en saisissant Aurilly à la ceinture et en l’enlevant de son cheval.

Tous deux roulèrent sur le chemin.

Aurilly allongea la main pour ressaisir son poignard.

— Non, Aurilly, non, lui dit Remy en se penchant sur lui et en lui appuyant le genou sur la poitrine, non, il faut demeurer ici.

Le dernier voile qui paraissait étendu sur le souvenir d’Aurilly sembla se déchirer.

— Le Haudoin ! s’écria-t-il, je suis mort !

— Ce n’est pas encore vrai, dit Remy en étendant sa main sur la bouche du misérable qui se débattait sous lui, mais tout à l’heure !

Et de sa main droite il tira son couteau de sa gaine.

— Maintenant, dit-il, Aurilly, tu as raison, maintenant tu es bien mort.

Et l’acier disparut dans la gorge du musicien, qui poussa un râle inarticulé.

Diane, les yeux hagards, à demi tournée sur sa selle, appuyée au pommeau, frémissante, mais impitoyable, n’avait point détourné la tête de ce terrible spectacle.

Cependant, lorsqu’elle vit le sang jaillir le long de la lame, elle se renversa en arrière et tomba de son cheval, roide comme si elle était morte.

Remy ne s’occupa point d’elle en ce terrible moment ; il fouilla Aurilly, lui enleva les deux rouleaux d’or, puis attacha une pierre au cou du cadavre et le précipita dans l’étang.

La pluie continuait de tomber à flots.

— Efface, ô mon Dieu ! dit-il, efface la trace de ta justice, car elle a encore d’autres coupables à frapper.

Puis il se lava les mains dans l’eau sombre et dormante, prit dans ses bras Diane encore évanouie, la hissa sur son