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pour commencer leur repas ; seulement, ils s’étaient mis à table ; quelques-uns dormaient de fatigue sur leurs chaises.

L’entrée du comte réveilla les dormeurs, et fit lever les éveillés. Henri jeta un coup d’œil sur la salle.

Des lampes de cuivre, suspendues au plafond, éclairaient d’une lueur fumeuse et presque compacte.

La table, couverte de pains de froment et de viande de porc, avec un pot de bière fraîche par chaque homme, eût eu un aspect appétissant, même pour des gens qui depuis vingt-quatre heures n’eussent pas manqué de tout.

On indiqua à Henri la place d’honneur.

Il s’assit.

— Mangez, Messieurs, dit-il.

Aussitôt cette permission donnée, le bruit des couteaux et des fourchettes sur les assiettes de faïence prouva à Henri qu’elle était attendue avec une certaine impatience et accueillie avec une suprême satisfaction.

— À propos, demanda Henri à l’enseigne, a-t-on retrouvé nos deux officiers de marine ?

— Oui, Monsieur.

— Où sont-ils ?

— Là, voyez, au bout de la table.

Non-seulement ils étaient assis au bout de la table, mais encore à l’endroit le plus obscur de la chambre.

— Messieurs, dit Henri, vous êtes mal placés et vous ne mangez point, ce me semble.

— Merci, monsieur le comte, répondit l’un d’eux, nous sommes très-fatigués, et nous avions en vérité plus besoin de sommeil que de nourriture ; nous avons déjà dit cela à messieurs vos officiers, mais ils ont insisté, disant que votre ordre était que nous soupassions avec vous. Ce nous est un grand honneur, et dont nous sommes bien reconnaissants. Mais néanmoins, si, au lieu de nous garder plus longtemps, vous aviez la bonté de nous faire donner une chambre…

Henri avait écouté avec la plus grande attention, mais il