Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/231

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désirs précis. Il se voyait à Paris. Tout le monde brûlait de le servir parce qu’il était intelligent, dévoué, fidèle et juste. Et puis il avait une si jolie maîtresse ! On ne saurait rien refuser à l’amant d’une femme aussi exquise… Il évoquait la stupeur ahurie et admirative de ses camarades disant : « Dué est parti avec sa cousine… »

Il ne doutait pas de soi et se croyait désormais en mesure de conquérir la ville capitale. Que ne ferait-on pas, ayant possédé Lucienne Dué, pour renouveler indéfiniment un tel bonheur ?

À ce souvenir, une flamme coulait dans ses artères. Il se retrouvait le mâle ardent qui ploie et possède la nymphe fugace dans tant de poèmes antiques et s’arrêtait aussitôt, en disant :

« Je ne puis la quitter comme cela. Il faut que j’y retourne… »

Mais il revoyait le sourire de Lucienne lorsqu’elle l’avait quitté en lui baisant le front : « Ce soir ! » Oui, ce soir. Il serait ce soir celui qui aime et qui sait aimer au delà des forces humaines…

Le levant commençait à se teinter de grisaille. Sous l’horizon, là-bas, le soleil répandait sa lumière. La campagne se dessinait maintenant, vulgaire et sournoise, dans ses chemins,