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KASCHMIR, JARDIN DU BONHEUR

regarda en silence. Pauvre, pieds nus, l’air d’un ascète, il avait une magnifique dignité, avec son nez busqué et sa barbe annelée. Il se retira aussitôt sans rien dire.

Soudain, à travers quelque chose, tout près de moi pourtant, et bien que je fusse seul, j’entendis une sorte de froissement. Je regardai. Le mur à cet endroit, sur un espace d’un mètre carré, avait été remplacé par un treillis métallique comme on en trouve en Europe dans les couvents contemplatifs de femmes, pour isoler les religieuses. On s’agitait de l’autre côté. Et j’entendis, en anglais, prononcés, sans aucun accent, ces mots invraisemblables :

— N’avez-vous pas eu peur, mon adoré ?

Je goûtai la parole cristalline, voix de femme évidemment, avec une joie profonde, mais je répondis avec une prudence arabe ou normande, en dogra, pour essayer d’identifier l’inconnue :