Page:Dunan - La Papesse Jeanne, 1929.djvu/60

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Ioanna vit sans qu’on l’aperçût une troupe d’émigrants passer dans des chariots branlants traînés par les hommes. Ils étaient peut-être cent, mâles et femelles, vêtus de débris polychromes, et dont les faces ne ressemblaient point à celles de ce pays germanique. Ils semblaient attentifs à éviter d’être surpris, se hâtaient, et des marmots nus couraient autour des véhicules misérables. Ensuite, la jeune fille aperçut une troupe armée, sans doute des Saxons, qui avançaient lentement avec des mines de brigands. Des pillards sans doute.

Après cela, elle progressa longtemps sans rencontrer personne. Il y avait parfois des traces humaines, dans la forêt, semblables à celles que devaient laisser les siens autour du gîte où elle avait vécu vingt ans. Cela paraissait indiquer des habitations bien dissimulées au sein des fourrés. Elle se hâtait de les fuir. Vers le soir Ioanna rencontra une vieille femme cassée et ridée, qui, non moins précautionneuse qu’elle-même, apparut à quelques pas sans qu’on eût pu deviner son approche.

La vieille eut un rire silencieux devant l’arrivante en qui elle devina une femme :

— Où vas-tu beau soldat ?

Elle parlait une langue sauvage que l’adolescente comprit à peine.

— Je me rends à la ville.