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LES MARCHANDS DE VOLUPTÉS


sept banqueroutes derrière lui, un général vénézuélien qui dévorait dans les boîtes de nuit le budget de son pays dont il était ministre des Finances, un joueur de baccara qui faisait des bancos de cinq cents billets sans en avoir le premier sou, un épiscope d’Honolulu qui cherchait des conversations sensationnelles jusque dans le lit des belles courtisanes, et un assassin célèbre, condamné à mort dans treize pays différents. On comprend qu’avec de telles références, Neige Borgia connût la gloire. Le plus curieux était que nul ne renonçât à elle de plein gré. Elle s’attachait si bien les mâles que tout leur désir était, après le plaquage, de revenir à la chair fascinante et aux baisers définitifs de leur chère Neige.

Voilà pourquoi, sachant que cette notabilité de l’amour fréquentait la Sangsue le mercredi, Amande voulut la voir. Elle avait appris cette coutume en passant, avec son père, devant le célèbre dancing. À ce moment, descendait d’une Lincoln, pareille à un meuble en vernis Martin, une admirable femme, vêtue si peu et si court qu’elle semblait un peu plus que nue.

Et le père d’Amande la désignait à sa fille.

— Voilà Neige Borgia !

— Elle est jolie, répondait Amande.

— Oui, beaucoup, et on ne l’oublie jamais quand on la connaît bien.