Page:Dunant - Un souvenir de Solférino, 1862.djvu/32

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plusieurs ne se permirent, pendant plus de vingt-quatre heures, aucun instant de repos ; deux d’entre eux qui étaient à l’ambulance placée sous les ordres du docteur Méry, médecin en chef de la garde, eurent tant de membres à couper et de pansements à faire qu’ils s’évanouirent ; et dans une autre ambulance, un de leurs collègues, épuisé de fatigue, fut obligé, pour pouvoir continuer son office, de se faire soutenir les bras par deux soldats.

Lors d’une bataille un drapeau noir, fixé sur un point élevé, indique ordinairement le poste des blessés ou les ambulances des régiments engagés dans l’action, et par un accord tacite et réciproque on ne tire pas dans ces directions ; quelquefois néanmoins les bombes y arrivent, sans épargner les officiers comptables et les infirmiers, ni les fourgons chargés de pain, de vin, et de viande destinée à faire du bouillon pour les malades. Ceux des soldats blessés qui sont encore capables de marcher, se rendent d’eux-mêmes à ces ambulances volantes ; dans le cas contraire on les transporte au moyen de brancards ou de civières, affaiblis qu’ils sont souvent par des hémorragies et par la privation prolongée de tout secours.


Sur cette vaste étendue de pays si accidentée, de plus de vingt kilomètres de longueur, et après les phases de bouleversement qu’entraînait un conflit aussi gigantesque, soldats, officiers et généraux ne peuvent savoir qu’imparfaitement l’issue de tous les combats qui se sont livrés,