Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/231

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

geant ses regards fermement dans les yeux du braconnier.

— Ce n’est pas vrai ! reprit-il plus haut.

— Eh bien ! qu’est-ce que tu as à dire de plus ? continua Lévise.

Guillaume arracha une branche à la haie comme pour passer sa colère sur quelque chose et se contenir. Il se rapprocha de Lévise.

— Tu t’es vendue ! lui dit-il. Le souffle de ses lèvres arriva jusqu’à la joue de la jeune fille. On eût dit qu’il lui avait lancé quelque objet meurtrissant à la face.

Elle rejeta la tête en arrière avec dégoût et répliqua, ne baissant ni la voix, ni les yeux : — Je me suis vendue ! oui !

Volusien et Guillaume se regardèrent stupéfaits. Ils ne comprirent pas le sentiment d’irréparable éloignement qui poussait Lévise. En disant comme eux : Je me suis vendue, elle brisait toute possibilité de rapprochement, elle les rendait encore plus ennemis, mais aussi encore plus étrangers. Une barrière définitive était dressée entre eux. Qu’à leurs yeux ce fût celle de la honte, Lévise la choisissait pour qu’elle fût plus infranchissable.

— Tu oses le dire ! s’écria Guillaume s’avançant vivement, mais Volusien l’arrêta par le bras.

— Oui, je me suis vendue ! reprit-elle alors avec un enthousiasme plein de mépris, pour vous échapper, pour n’être plus avec vous, pour ne plus vous voir, pour sortir de vos brutalités, de vos idées de méchanceté, de votre vie de bêtes fauves, pour n’être plus moi-même une espèce de brute avec vous et comme vous !…

Guillaume et Volusien ne voyaient là que des insultes. Leur irritation montait.

— Que t’avais-je dit, Volusien ? interrompit Guillaume,