Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/59

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doute me renvoyer, parce qu’elle lui a monté la tête…

— Allons, que diable, obéissez donc ! s’écria-t-il en la poussant par les épaules devant les fourneaux.

Euronique plia enfin, mais elle fit semblant de pleurer comme pour reprocher à Louis l’emploi de la force. Cet accès de sensibilité ne lui réussit pas. Ses grimaces pour forcer les larmes à couler devenaient si drôles que Louis ne put s’empêcher de rire.

Enfin Lévise eut un bon dîner. Euronique était à moitié domptée. Louis n’avait pas perdu sa journée ! Il était dans le ravissement.

Le jour suivant, s’étant levé de bonne heure, il put voir, de sa fenêtre, arriver Lévise. Elle portait une énorme brassée de fleurs. La jeune fille en avait toute sa charge.

Louis crut d’abord qu’on avait donné à Lévise la commission d’apporter ces fleurs à quelqu’un du village, lorsque la jeune fille entra dans la maison avec ses fleurs.

— Elles sont donc pour moi ! se dit Louis, et le sang lui monta aux joues.

Voilà, pensa-t-il en souriant tout seul de son idée, voilà la récompense de ma belle conduite d’hier. Lévise me témoigne sa reconnaissance.

Louis s’élança en bas. Son temps se passait à descendre et remonter continuellement à propos de Lévise.

La jeune fille arrangeait déjà en grande hâte ses fleurs dans de vieux vases de jardin, en faïence qu’on laissait dans la pièce où elle travaillait. À côté d’elle se tenait Euronique secouant avec dédain la grosse gerbe fleurie. La vieille disparut dès qu’elle aperçut Louis.

— Oh ! dit-il à Lévise, quelles belles fleurs vous avez apportées là ! Et le jeune homme ne s’imaginait pas combien sa voix était caressante lorsqu’il parlait à sa « protégée ».