Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/58

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traire chez l’homme, les aptitudes de toute sorte que suppose la vie sociale sont beaucoup trop complexes pour pouvoir s’incarner, en quelque sorte, dans nos tissus et se matérialiser sous la forme de prédispositions organiques. Il s’ensuit qu’elles ne peuvent se transmettre d’une génération à l’autre par la voie de l’hérédité. C’est par l’éducation que se fait la transmission.

Cependant, dira-t-on, si l’on peut concevoir, en effet, que les qualités proprement morales, parce qu’elles imposent à l’individu des privations, parce qu’elles gênent ses mouvements naturels, ne peuvent être suscitées en nous que sous une action venue du dehors, n’y en a-t-il pas d’autres que tout homme est intéressé à acquérir et recherche spontanément ? Telles sont les qualités diverses de l’intelligence qui lui permettent de mieux approprier sa conduite à la nature des choses. Telles sont aussi les qualités physiques, et tout ce qui contribue à la vigueur et à la santé de l’organisme. Pour celles-là, tout au moins, il semble que l’éducation, en les développant, ne fasse qu’aller au-devant du développement même de la nature, que mener l’individu à un état de perfection relative vers laquelle il tend de lui-même, bien qu’il puisse y atteindre plus rapidement grâce au concours de la société.

Mais ce qui montre bien, malgré les apparences, qu’ici comme ailleurs l’éducation répond avant tout à des nécessités sociales, c’est qu’il est des sociétés où ces qualités n’ont pas été cultivées du tout, et