Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/433

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ils n’ont pas aperçu ce lent travail de consolidation, ce réseau de liens qui peu à peu se tisse de soi-même et qui fait de la solidarité organique quelque chose de permanent.

Or, dans tous les cas que nous avons décrits plus haut, cette réglementation ou n’existe pas, ou n’est pas en rapport avec le degré de développement de la division du travail. Il n’y a plus aujourd’hui de règles qui fixent le nombre des entreprises économiques et, dans chaque branche d’industrie, la production n’est pas réglementée de manière à ce qu’elle reste exactement au niveau de la consommation. Nous ne voulons d’ailleurs tirer de ce fait aucune conclusion pratique ; nous ne soutenons pas qu’une législation restrictive soit nécessaire ; nous n’avons pas à en peser ici les avantages et les inconvénients. Ce qui est certain, c’est que ce défaut de réglementation ne permet pas l’harmonie régulière des fonctions. Les économistes démontrent, il est vrai, que cette harmonie se rétablit d’elle-même, quand il le faut, grâce à l’élévation ou à l’avilissement des prix, qui, suivant les besoins, stimule ou ralentit la production. Mais, en tout cas, elle ne se rétablit ainsi qu’après des ruptures d’équilibre et des troubles plus ou moins prolongés. D’autre part, ces troubles sont naturellement d’autant plus fréquents que les fonctions sont plus spécialisées ; car plus une organisation est complexe, et plus la nécessité d’une réglementation étendue se fait sentir.

Les rapports du capital et du travail sont, jusqu’à présent, restés dans le même état d’indétermination juridique. Le contrat de louage de services occupe dans nos Codes une bien petite place, surtout quand on songe à la diversité et à la complexité des relations qu’il est appelé à régler. Au reste, il n’est pas nécessaire d’insister sur une lacune que tous les peuples sentent actuellement et s’efforcent de combler.

Les règles de la méthode sont à la science ce que les règles du droit et des mœurs sont à la conduite ; elles dirigent la pensée du savant comme les secondes gouvernent les actions des hommes. Or, si chaque science a sa méthode, l’ordre qu’elle