Page:Durkheim - Les Règles de la méthode sociologique.djvu/200

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

faut sortir des généralités et entrer dans le détail des faits. C’est ainsi que la sociologie, à mesure qu’elle se spécialisera, fournira des matériaux plus originaux a la réflexion philosophique. Déjà ce qui précède a pu faire entrevoir comment des notions essentielles, telles que celles d’espèce, d’organe, de fonction, de santé et de maladie, de cause et de fin s’y présentent sous des jours tout nouveaux. D’ailleurs, n’est ce pas la sociologie qui est destinée à mettre dans tout son relief une idée qui pourrait bien être la base non pas seulement d’une psychologie, mais de toute une philosophie, l’idée d’association ?

Vis-à-vis des doctrines pratiques, notre méthode permet et commande la même indépendance. La sociologie ainsi entendue ne sera ni individualiste, ni communiste, ni socialiste, au sens qu’on donne vulgairement à ces mots. Par principe, elle ignorera ces théories auxquelles elle ne saurait reconnaître de valeur scientifique, puisqu’elles tendent directement, non à exprimer les faits, mais à les réformer. Du moins, si elle s’y intéresse, c’est dans la mesure où elle y voit des faits sociaux qui peuvent l’aider à comprendre la réalité sociale en manifestant les besoins qui travaillent la société. Ce n’est pas, toutefois, qu’elle doive se désintéresser des questions pratiques. On a pu voir, au contraire, que notre préoccupation constante était de l’orienter de manière à ce qu’elle puisse aboutir pratiquement. Elle rencontre nécessairement ces problèmes au terme de ses recherches. Mais, par cela même qu’ils ne se présentent à elle qu’à ce moment, que, par suite, ils se dégagent des faits et non des passions, on peut prévoir