Page:Durkheim - Les Règles de la méthode sociologique.djvu/77

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geantes de la vie sociale, les seconds aux conditions constantes ; mais les uns ne sont pas plus artificiels que les autres.

Il y a plus : alors même que ces actes auraient indûment revêtu le caractère criminologique, néanmoins ils ne devraient pas être séparés radicalement des autres ; car les formes morbides d’un phénomène ne sont pas d’une autre nature que les formes normales et, par conséquent, il est nécessaire d’observer les premières comme les secondes pour déterminer cette nature. La maladie ne s’oppose pas à la santé ; ce sont deux variétés du même genre et qui s’éclairent mutuellement. C’est une règle depuis longtemps reconnue et pratiquée en biologie comme en psychologie et que le sociologue n’est pas moins tenu de respecter. À moins d’admettre qu’un même phénomène puisse être dû tantôt à une cause et tantôt à une autre, c’est-à-dire à moins de nier le principe de causalité, les causes qui impriment à un acte, mais d’une manière anormale, le signe distinctif du crime, ne sauraient différer en espèce de celles qui produisent normalement le même effet ; elles s’en distinguent seulement en degré ou parce qu’elles n’agissent pas dans le même ensemble de circonstances. Le crime anormal est donc encore un crime et doit, par suite, entrer dans la définition du crime. Aussi qu’arrive-t-il ? C’est que M. Garofalo prend pour le genre ce qui n’est que l’espèce ou même une simple variété. Les faits auxquels s’applique sa formule de la criminalité ne représentent qu’une infime minorité parmi ceux qu’elle devrait comprendre ; car elle ne convient ni aux crimes religieux, ni aux crimes contre l’étiquette, le cérémonial, la tradition, etc., qui, s’ils ont disparu