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amour vainqueur


Ma chère enfant,

La sensibilité et le dévouement d’une mère n’ont pas de bornes ; si les conseils que je te donne dans cette lettre, sont de nature à froisser ton orgueil, j’espère que tu tiendras compte de la surprise que tu m’as causée ; je ne veux que ton bonheur.

Je sais que tu as confiance en ta mère ; je sais que tu comprends toute l’étendue de l’amitié que je te porte !

Puisque tu me demandes des conseils, tu as donc confiance en l’expérience de celle qui n’a jamais épargné ni chagrin, ni argent ni labeur pour te procurer le bonheur pour lequel tu soupirais depuis des années.

Je te demande, ma chère enfant, de revenir à Montréal, au plus tôt, sinon, tout de suite, ne cherche pas à contraindre ton cœur ; tu es jeune, il te reste encore des espérances ; d’ailleurs, il te vaudra mieux vivre sans être aimée, en ta liberté, que de vivre enchaînée sous le pouvoir d’un homme que tu ne peux aimer ! Si tu ne l’aimes pas maintenant, tu l’aimeras encore moins dans le mariage ! Je te prie de le fuir de la manière la plus courtoise possible, et reviens au foyer où le cœur de ta mère t’attend ; n’hésite pas ; car ce M. se croyant trompé pourrait chercher à tirer vengeance contre toi.

N’accepte plus rien de lui, ni présents, ni promenades, ni bouquets, ni amours, ne lui fais pas de promesses ; la liberté est entre toutes les jouissances de la vie, celle qui procure le plus de bonheur.

Un amour enchaîné est un bonheur à demi seulement goûté, et dont la saveur très souvent est changée en amertume ! l’or et l’argent seraient-ils sur tes pas, que tu ne saurais goûter le vrai bonheur !

Au nom des sacrifices que nous avons faits, ton père et moi, pour seconder toutes tes ambitions nobles et légitimes, je te prie de bien vouloir réfléchir et de mettre fin à ces tourments de ton âme, en proie à de l’indécision.

Nous prions que le Seigneur éclaire tes démarches et te protège et te ramène saine et sauve au foyer ou à ton emploi, où tu pourras continuer à travailler à ton avancement et à tes succès tant souhaités.