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amour vainqueur

contrer chez une parente ; c’était une bien belle journée du commencement du mois de septembre ! Rogers, le sourire aux lèvres, s’efforça d’être bon pour sa mère et parut ne pas être affecté par la lettre qu’elle lui avait écrite ; son père accompagnait sa mère et ne lui ménagea pas sa profonde surprise de l’indignation profonde qu’il avait ressentie, à la nouvelle que son fils avait écrit à Ninie ! Et alors, le père retirant à l’écart, son fils Rogers, lui rappela comme l’avait fait la mère sur sa lettre, tous les sacrifices d’argent qu’il avait dû s’imposer pour le faire instruire. Rogers, dans un moment de colère, aussi capable de fierté que de sensibilité, s’adressant à son père et à sa mère : Pourquoi, parents, annoncez-vous partout que je me destine à devenir prêtre ? Croyez-vous, par ce moyen, enchaîner ma liberté ? Vous me parlez de sacrifices que vous avez faits pour moi, je l’avoue, cela coûte cher aux parents de faire instruire un garçon ! mais est-ce que cela coûte assez cher que, pour vous être reconnaissant, je doive sacrifier mes goûts, mon cœur et mes affections, et ma vie même ?

En faisant des sacrifices, ne faites-vous pas que votre devoir ? vous avez, vous le savez, une obligation qui découle du droit naturel et du droit divin, d’aimer vos enfants, de pourvoir à leur éducation et à leur instruction dans la mesure de vos forces ! Qu’avez-vous fait pour moi, de plus que pour les autres enfants ?

Non, mon fils, lui répondit le père tout étonné des considérations que Rogers pour la première fois de sa vie se permettait de jeter sous les yeux de ses parents.

Nous n’avons pas l’intention de te forcer à te faire prêtre ! Nous voulons que tu aies toute la liberté pour choisir ton état ! Mais regarde donc, réfléchis un peu, tu serais si bien ; vois ton oncle le Curé, comme il est heureux ; il n’a pas de troubles ni inquiétudes ; il est maître de sa maison, il conduit à sa guise, il a son cheval et sa voiture, sort et rentre quand il lui plaît, il gagne de l’argent ; il est certain que sa vie est assurée !

Et toi, mon cher enfant, je ne te crois pas appelé dans le monde ; ta nature enthousiaste et ta ténacité à ne pas vouloir