Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/459

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pensée d’une espèce terrestre plus haute. Bien souvent, dans un élément qui lui faisait obstacle, elle a dû se contenter d’une queue de poisson, quand elle aurait donné volontiers par-dessus le marché une paire de pieds de derrière ; parfois même on aperçoit dans le squelette les épiphyses toutes prêtes. »

À côté du serpent étaient quelques cocons renfermant des chrysalides dont Goethe attendait la sortie prochaine. La main sentait déjà à l’intérieur un certain mouvement. Goethe les prit sur la table, les considéra avec grande attention et dit ensuite à son enfant : « Porte-les à la maison ; ils ne sortiront sans doute pas aujourd’hui, la journée est trop avancée. » Il était quatre heures de l’après-midi. À ce moment madame de Goethe entra dans le jardin. Goethe prit les cocons de la main de l’enfant, et les reposa sur la table. « Que le figuier est beau, dans ce moment, avec ses fleurs et son feuillage ! » nous dit de loin madame de Goethe, en venant à nous par l’allée du milieu. Après que nous nous fûmes salués, elle me demanda si j’avais déjà regardé de près et admiré le beau figuier. « Il ne faut pas oublier, dit-elle en adressant la parole à Goethe, de le faire placer à l’intérieur pendant l’hiver. » Goethe sourit et me dit : « Laissez-vous montrer le figuier, et tout de suite, sans cela nous n’aurons pas de repos pendant toute la soirée ! Il mérite vraiment d’être vu, et est digne qu’on fasse de lui un éloge splendide et qu’on le traite avec tous les ménagements possibles. » — « Comment donc s’appelle cette plante exotique, que l’on nous a envoyée récemment d’Iéna. » — « L’ellébore, peut-être ? » — « Justement ! elle vient aussi très-bien. » — « J’en suis fort content. Nous arriverons à faire de notre jardin une seconde Anticyre ! »