Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/165

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théâtral comme des autres arts. Ce que l’artiste fait ou a fait nous met dans la disposition même où lui-même était quand il fit son œuvre. Si l’artiste avait l’esprit à l’aise, le nôtre sera à l’aise également ; s’il était tourmenté, il nous rendra tout inquiets. — Les artistes ont ordinairement cette aisance quand ils sont tout à fait nés pour ce qu’ils font ; voilà pourquoi les tableaux des Hollandais font tant de bien à regarder, c’est parce que ces artistes ont peint la vie familière qui les entourait, et qu’ils connaissaient dans la perfection. Pour qu’un acteur nous donne ce bien-être, il faut que ses études, son imagination, son naturel, l’aient rendu tout à fait maître de son rôle, que tous les mouvements du corps soient à ses ordres, et qu’il soit soutenu par une certaine énergie juvénile. L’étude ne suffit pas sans imagination, et l’étude et l’imagination ne suffisent pas sans naturel. Chez les femmes, presque tout se fait par l’imagination et par le tempérament ; c’est là ce qui était si remarquable chez Madame Wolff. »

Nous continuâmes à parler des acteurs principaux de Weimar ; mais Faust me revenait dans l’esprit, je pensais à l’Homunculus, je me demandais comment on pourrait le représenter sur la scène. — « Si on ne voit pas le petit personnage, dis-je, il faudrait du moins voir la lueur dans la fiole ; et ce qu’il dit est trop important pour qu’un enfant puisse jouer ce rôle ? »

« — Wagner, dit Goethe, devra conserver la fiole dans ses mains, et la voix semblera sortir de la fiole même. C’est un rôle pour un ventriloque ; j’en ai entendu qui sauraient parfaitement se tirer d’affaire en cette circonstance. »

Je demandai aussi comment on pourrait représenter