Page:Edgar Poe Arthur Gordon Pym.djvu/86

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aussitôt qu’ils furent partis, et s’assit juste à la place occupée tout à l’heure par le second. Il commença à causer avec Auguste d’une manière tout à fait amicale, et nous nous aperçûmes alors que son ivresse, — très-apparente pendant que les deux autres étaient avec lui, — était feinte en grande partie. Il répondit à toutes les questions de mon camarade avec une parfaite facilité. Il lui dit qu’il ne doutait pas que son père eût été recueilli, parce que le jour où on l’avait largué en dérive, juste avant le coucher du soleil, il n’y avait pas moins de cinq voiles en vue ; enfin il se servit d’un langage qu’il essayait de rendre consolateur, et qui ne me causa pas moins de surprise que de plaisir. À dire vrai, je commençais à concevoir l’espérance que Peters pourrait bien nous servir d’instrument pour reprendre possession du brick, et je fis part de cette idée à Auguste aussitôt que j’en trouvai l’occasion. Il pensa comme moi que la chose était possible, mais il insista sur la nécessité de s’y prendre avec la plus grande prudence, parce que la conduite du métis ne lui paraissait gouvernée que par le plus arbitraire caprice ; et vraiment il était difficile de deviner s’il avait jamais l’esprit bien sain. Peters remonta sur le pont au bout d’une heure à peu près et ne redescendit qu’à midi, apportant alors à Auguste une fort belle portion de bœuf salé et de pudding. Quand nous fûmes seuls, j’en pris joyeusement ma part, sans me donner la peine de repasser par le trou. Personne ne descendit dans le gaillard d’avant de toute la journée, et le soir je me mis dans le cadre d’Auguste, où je dormis profondément et délicieusement presque jusqu’au point du jour. Il m’é-