Page:Eekhoud - Kermesses, 1884.djvu/191

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avant de sortir d’ici. Un pauvre diable comme vous dédaignerait cette occasion ! Avouez que vous travailliez pour en arriver là ? Et on fait le dédaigneux à présent afin de ne pas avoir l’air si « politique » ! Ignorez-vous, capon, qu’il n’existe pas de plus sérieuse héritière dans le pays. Ne s’apparente pas qui veut aux Mollendraf… Tu la vois toujours volontiers, j’espère ?

— Votre Véva vaut son pesant d’or ; c’est une ferme dirne, sans conteste ; elle vaut plus que tout votre bien, sans en excepter vos trois garçons — soit dit sans les froisser — … mais Véva ne sera jamais ma femme.

— Que radote l’innocent ? laissa échapper le fermier.

Le grand Bert fit mine de se lever ; Gust remuait les pieds, gambillait, crissait des dents, promenait impatiemment ses mains sur ses cuisses ; quant à Pauw, ses grands yeux de poisson roulaient hébétés dans sa face pouparde et le sang marbrait ses joues veules.

Mais le baes se contint, redevint plus doux que jamais :

— Écoute d’abord mes offres… Tu connais mon champ de la Droeve-Wei… une pièce de cinquante verges, avec la maison donnant sur la chaussée de Bergen… Vous savez, vous autres, la même maison qui m’a coûté cinquante florins de peinture aux avents… Mark, le champ et la maison sont à toi…

— Gardez-les !

— Canaille !

Les trois chaises des frères Mollendraf mues par un même courant galvanique se rapprochèrent de Marcus