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LES FUSILLÉS DE MALINES

Et, avisant un ou deux des gaillards auxquels ils avaient donné la volée :

— Pas de chance, camarades, fit-il. Nous vous avons rendu presque un mauvais service. Votre affaire est claire à présent.

Puis, d’un ton plus sérieux et leur tendant la main qu’ils serrèrent, non seulement sans rancune mais avec orgueil : « Nous voilà vraiment dignes les uns des autres et solidaires jusque dans la mort ! »

L’après-midi un calme énorme, un silence sépulcral prévalut dans la cité. Il ne restait plus trace de sédition. Des balayeurs nettoyaient la place jonchée de papiers et d’éclats de verre. Au Bruul, des ménagères proprettes récuraient à grande eau ou saupoudraient de sable les pavés saigneux.

On ne rencontrait dans les rues que des patrouilles prolongeant les transes des bourgeois claquemurés, et procédant, de porte en porte, à des visites domiciliaires.

Sous l’œil défiant des perquisitionnaires, les maîtres du logis rivalisaient de civisme, se congratulaient à haute voix, exaltaient la