Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/171

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et se dédommageant au bal du dimanche où elle s’amusait avec la fureur de sa jeunesse exubérante, redevenue la libre « marée montante » qui entraîne dans son flot les mâles ainsi que des épaves. Gaud rageait dans un coin, buvait, s’échauffait, et parfois livrait aux galants une bataille dont elle le dégageait avec des cris de mère pour l’emmener ensuite à son bras, comme un enfant.

Il décida de quitter le pays. Il y avait trop de fêtes, trop de tentations, surtout pendant ces tirs de campagne que les régiments de l’ouest font aux Sables.

Alors c’est la kermesse. Remplie d’uniformes écarlates et de la fierté brutale des jeunes hommes, la ville rutile au soleil et chante aux lampions la nuit entière. Il y a des marches aux fanfares qui emportent les filles au long des compagnies ; il y a des concerts où l’on se cherche pour s’accoupler, le soir ; et au noir ; il y a, sous bois, des spasmes et des cris comme si la terre elle-même assouvissait son rut. Il tombe là quelques milliers de gaillards, tout roides de sève et qui ont vingt ans, parmi un peuple de chaudes luronnes saumurées, et leurs sangs s’appellent au rythme large de l’instinct. Après, les soldats s’en reviennent avariés, et les filles restent grosses.

Gaud fit son ballot et emmena sa femme. Ils allèrent à Saint-Gilles où ils ne trouvèrent point