Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/200

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restait de la couleur, il peignit aussi sa brouette, en bleu, blanc, rouge.

Pas une planche, pas un pieu n’échappa au coaltar ou à l’huile. L’anse des seaux, le manche des outils furent garnis de ficelle et les vieilles chaises refoncées en tresse anglaise.

Tout, autour de Bernard, prenait un aspect conforme à sa nouvelle personne morale. On reconnaissait à première vue la demeure d’un retraité, dans cette maisonnette et ce jardin nets comme des jouets, où il y avait tant de choses inutiles, et de propreté minutieuse. Ces arabesques de coquillages, ces peintures, et ce goût de la symétrie dénonçaient l’homme qui s’ingénie à occuper son existence et qui a servi. Il y avait du brigadier des douanes dans ces objets à la parade et dans cette manie de bricolage, il y avait de l’homme de mer.

Cependant la Bernard poursuivait son éternel tricotage. Entre les repas, on la voyait à sa place, derrière la vitre, maniant les aiguilles qu’elle frottait par intervalle dans ses cheveux pour les faire glisser. C’est qu’il en fallait des chaussettes pour ses quat’ z’hommes, comme elle disait, et des maillots pour ce polisson de P’ tit Pierre qui rentrait toujours en loques !

Par instant, son bon visage bouffi s’avançait à la fenêtre et elle criait à Bernard avec conviction,