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— Ah ! tu verras !

Le soir ; quand Pierre fut couché, la mère dit :

— Lui fais pas un bateau toujours !

— Sois tranquille, répliqua Bernard d’un air entendu.

Mais le lendemain, il alla consulter les vieux sur la cale, parce qu’il ne savait que faire ; et tous ensemble, le pilote, Hourtin, Tonnerre, n’eurent qu’une seule et même idée.

— On va lui tailler un bateau !

Ils ne pensaient, comme tous les marins, qu’à la barque, qu’à façonner en petit cette chose téméraire et belle qui a contenu tant de leur existence. Le bateau est le jouet de leur instinct au même titre que, pour la fillette, la poupée qui représente le fruit futur de sa chair féconde. Seulement, chacun, raidi dans sa routine, ne voyait que le bateau de ses navigations : Hourtin préconisa le trois-mâts, Clémotte le côtre, Tonnerre le canot.

Ils comprirent avec peine qu’il fallait chercher ailleurs et Tonnerre, qui a sauvé cent-trente vies humaines, proposa un lance-pierre en disant :

— C’est rigolo, ça tue bien !

P’tit Pierre eut l’engin confectionné avec une fourche en bois choisie dans des fagots. Il s’exerçait du matin au soir à mitrailler des carapaces de cancres qui volaient en éclats sous le caillou.