Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/282

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soleil. Au large on apercevait des sardiniers en pêche. Il s’attarda à compter les bretons distingués par leurs voilures chargées d’ocre rouge, et à observer des pieds de vent échevelés, dans l’est du ciel.

La mer mouvante lui soufflait à la face un air tonique qu’il engorgeait à pleins poumons. Il pensa à Tonnerre qui l’avait tant battue cette mer, « avec ses bras ! » comme il disait ; et il revit les plongées tragiques du vieux dompteur de vagues, dans les bourrasques ; et il se sentit plus ému à ce souvenir que tout à l’heure, quand il avait pêché le cadavre. Tout de même, Elle avait pris sa revanche, l’hypocrite, sans colère, en câlinant. Et P’tit Pierre sourit en rentrant au village.

Le jour suivant on enterra le maître nageur, qui avait sauvé cent trente vies humaines, dans un coin du cimetière, avec ses médailles. À l’atelier P’tit Pierre lui bâtit une croix, par charité. Le père Bernard et Hourtin portèrent le corps derrière le curé. Clémotte suivit, malgré ses rhumatismes, avec trois femmes et le chien. Les pêcheurs étaient en mer ; ils n’ont pas de temps à perdre quand la sardine est là.

Elle donnait si abondamment autour de l’île, que des centaines de barques accouraient de Bretagne. Les usines racolaient au loin des filles pour travailler. Une grosse activité secouait le village et Tonnerre disparut sans laisser d’autre