Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/174

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— Ce n’est pas très gentil de me dire que je suis méchant.

— Je n’ai pas dit cela du tout.

— Je ne serai jamais bon à rien, Mary, si vous ne voulez pas me dire que vous m’aimez, si vous ne me promettez pas de devenir ma femme, quand je serai en état de me marier, bien entendu.

— Je ne vous épouserais pas, alors même que je vous aimerais. Je ne puis certainement pas vous promettre de vous épouser.

— Mais c’est très mal, Mary. Si vous m’aimez vous devez pouvoir m’engager votre promesse.

— Au contraire ! je ne trouverais pas bien de vous épouser, même si je vous aimais.

— Vous voulez dire que je suis maintenant sans moyens d’entretenir une femme. Oui, sans doute, je n’ai que vingt-trois ans.

— Sur ce dernier point vous changerez. Mais je ne suis pas aussi certaine des autres changements. Mon père dit qu’un paresseux n’a pas le droit de vivre, encore moins de se marier.

— Ainsi il ne me reste qu’a me faire sauter la cervelle ?

— Non, tout bien réfléchi, je crois que vous feriez mieux de passer votre examen. J’ai entendu dire à M. Farebrother que c’était honteusement facile.

— Tout cela est bel et bien. Pour lui, tout est facile. Ce n’est pas que l’intelligence ait rien à y faire. Je suis dix fois plus intelligent que beaucoup de ceux qui le passent.

— Grand Dieu ! dit Mary incapable de réprimer une observation sarcastique. Cela explique les pasteurs comme M. Crowse. Mais cela prouve peut-être seulement que vous êtes dix fois plus paresseux que les autres.

— Eh bien, si je le passais, vous ne voudriez pourtant pas me voir entrer dans l’Église ?

— Il ne s’agit pas de ce que je puis désirer pour vous ;