Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/176

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être était-ce son affection pour une autre femme qui le rendait si anxieux de mettre les cent livres de son oncle à l’abri de sa prodigalité ordinaire ; car le créancier auquel il devait cent soixante livres avait en sa possession une garantie plus solide encore, sous forme d’un billet signé par le père de Mary.



CHAPITRE III


Nous avons maintenant à faire connaître à quiconque s’intéresse à lui, le nouveau venu Lydgate, et plus à fond que ne le connaissent ceux mêmes qui l’ont le plus fréquenté depuis son arrivée à Middlemarch. On peut louer, encenser un homme ou le tourner en ridicule, ne voir en lui qu’un instrument, on peut s’éprendre de lui, le choisir comme époux sans qu’il cesse de rester virtuellement inconnu. On avait pourtant l’impression générale que Lydgate n’était pas un médecin de province ordinaire, et, à cette époque, à Middlemarch, une telle impression signifiait qu’on attendait de lui de grandes choses. Chaque famille avait de son médecin une très haute idée et lui supposait une habileté sans bornes dans le traitement des maladies les plus perfides et les plus capricieuses. L’évidence de cette habileté appartenait à l’ordre intuitif le plus élevé. La clientèle féminine, notamment, restait immuablement attachée à son opinion, que la vérité même de la médecine fût d’ailleurs représentée, pour les unes, par le praticien Wrench et son traitement tonique, et, pour les autres, par Toller et le système débilitant. Les temps héroïques des saignées abondantes et des vésicatoires n’étaient pas encore passés, encore moins les temps des théories absolues où, dès qu’une maladie quelconque était baptisée, il ne pouvait plus y avoir