Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/223

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il se prononcerait, et c’était une souffrance de tous les instants que cette espèce de sujétion qui lui avait été à peu près imposée. Comme il s’était autrement tracé son rôle) social dans sa chambre d’étudiant !

Lydgate ne se mit en route qu’assez tard ; le docteur Sprague, deux autres médecins et plusieurs des directeurs étaient arrivés à l’avance. M. Bulstrode, trésorier et président, n’était pas encore là. Impossible de préjuger, d’après la conversation, l’issue encore problématique de l’affaire ; il n’était nullement certain que Tyke eût la majorité. Les deux médecins, par extraordinaire, se trouvèrent d’accord. Le docteur Sprague, grave et renfrogné, était, comme chacun l’avait prévu, partisan de Farebrother. Traité par ses voisins de tête dure et d’esprit sec, il était plus que suspect de manquer totalement de religion, mais Middlemarch s’accommodait parfaitement chez lui de cette imperfection, tout comme chez un lord-chancelier, et n’en avait peut-être que plus de confiance encore dans son habileté professionnelle.

En matière religieuse, le docteur Minchin, son confrère, aimait pour son compte à rester dans un ordre d’idées assez général pour accorder de loin sa sanction de médecin à toute opinion sérieuse, qu’elle émanât de l’Église établie aussi bien que des dissidents, plutôt qu’une adhésion formelle à un dogme particulier.

Le docteur Minchin avait les mains douces, le teint pâle, les contours arrondis, l’apparence d’un doux et aimable clergyman.

Le docteur Sprague, au contraire, était d’une taille exagérée ; ses pantalons plissés aux genoux laissaient trop voir de la botte à une époque où les sous-pieds semblaient indispensables à la dignité de la tenue ; on l’entendait entrer et sortir, monter et descendre bruyamment. C’était un personnage de poids, et on pouvait s’attendre à le voir attaquer en face une maladie quelconque et s’en rendre maître ; au